jeudi 28 janvier 2016

Dressages. Carnets de dominance, 2



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Alors je me suis assise, j'ai croisé les jambes, et je t'ai ordonné de laisser couler le champagne sur mon pied qui flottait doucement au-dessus de la coupe.  Tu tremblais et à un certain moment, j'ai craint que la bouteille t'échappe des mains.  Je t'avais prévenu: une seule goutte sur le tapis, une seule, et tu prenais
le
cachot



Je portais une robe noire de coupe simple et classique.  Tu m'as demandé si j'allais me changer pour................. 

et je t'ai giflé, tu as compris que je ne rigolais pas, que je ne tolérerais plus que tu me confondes avec les allumées de bas étage dont tu contemplais les photos sur les réseaux de la solitude, toutes ces vieilles putes qui enfilaient des godasses dignes de l'Armée du Salut, et qui se croyaient sexy alors qu'elles n'étaient que pitoyables, prodigieusement aveugles au ridicule de leurs projections narcissiques.   

Elles ne seraient jamais autre chose que des copies salopées de l'Idée que j'étais seule à incarner, tu devais t'en souvenir. 

Tu as dit «oui, madame» et je t'ai giflé à nouveau, encore plus fort, je me suis même cassée un ongle sous le choc et ta lèvre saignait.  Et je t'ai dit

je ne suis pas
ta dame / ordure je suis
reine et plus encore je suis
déesse

Tu as murmuré le dernier mot en tremblant et j'ai vidé la coupe d'un seul trait. J'ai toujours aimé le goût de ma peau, son parfum de sel caramélisé, surtout lorsqu'il se mêle au passage des alcools âcres. 

Puis je t'ai ordonné de te mettre à nu et de t'agenouiller devant le chevalet.  Tu as pris place en silence, j'ai rabattu le plateau supérieur sur ta tête et sur tes poignets, et j'ai verrouillé le tout.




Or donc, nous y voici, salaud.

Tes mains et ta tête sont coincées, parfaitement immobilisées, tu ne peux rien faire que de t'abrutir à fixer le plancher, et si tu fais un effort surhumain pour lever la tête et regarder droit devant, à supposer que tu parviennes à maintenir cette station plus de quelques secondes, ta vision s'arrête au mur sur lequel tu aperçois mon ombre mouvante.  Tu es pareil à ces prisonniers dans l'allégorie de la caverne de Platon, sauf qu'ici il ne se trouvera personne pour te libérer de tes chaînes, et ce n'est pas toi qu'on fera monter jusqu'à la lumière, c'est plutôt la lumière qui descendra sur toi, c'est elle qui se fraiera un chemin en toi
en passant
par 
ton 
cul.  Je te l'ai juré.

Mon ombre te plaît?  Tu te casserais le cou plutôt que de te résigner à la voir disparaître, n'est-ce pas?  Je sais.  J'ai réglé l'éclairage au quart de tour, je n'ai rien laissé au hasard.  Rien de flou, jamais, c'est le point essentiel.  Une ombre noire et ciselée à la perfection, une ombre que rien ne viendra parasiter, pas même les variations imaginaires de la mort
qui te réclame 
déjà.  Je me le suis juré.

Or donc, nous y voici, petite chose.

Je fais glisser le plateau horizontal du carcan de manière à ce que tes reins se creusent, que tes cuisses s'écartent davantage l'une de l'autre et que ton cul s'ouvre comme un charnier. 

Tu gémis: Je suis votre chienne indigne, mon cul est à vous, faites-en ce que vous voudrez...

Je sais.  Je veux cela comme je m'en tape.  Je laisse glisser ma robe sur le plancher, et je suis nue, froidement nue, à l'exception de ces escarpins que je t'ai montrés tout à l'heure et qui t'ont fait écarquiller les yeux. 

Tu disais: Pas besoin de lubrifiant, ma salive suffira...  Déesse, je sucerai ces talons aiguilles, je les lécherai langoureusement pour qu'ils déchirent mon cul de truie, mon cul de salope qui se cambrera bien sec pour s'offrir à vous...

Vraiment?  Mais dis-moi, minable, pour quelle raison aurais-je consenti à ce que tu abandonnes ta bave de limace sur des escarpins qui m'ont coûté la peau des fesses?

Quel dommage que tu doives te rapporter à mon ombre et que tu ne puisses poser les yeux sur moi -- voir comme je suis belle et puissante, libre comme une voiture sport qui passe la rampe, crève le rideau de la tempête et plonge dans la rivière glacée à 300 km/h.

Vois-tu, mes talons sont effilés comme les aiguilles dont ils portent si bien le nom.  Leur claquement sur le plancher a quelque chose de métallique.  Tu perçois le son étrange qu'ils rendent lorsque je me déplace en direction de la fenêtre?  C'est que le dard de mes escarpins est d'une composition particulière, et j'ai laissé le fer de mes talons rougir 
dans 
le 
foyer 
pendant deux heures.  Tu me suis?

Oui, tu me suis et tu me suivras jusqu'au bout, tu n'as d'ailleurs pas vraiment le choix.  La nuit à venir te fait-elle peur?  Une partie de toi la redoute, une autre la désire, et tout de toi la redoute dans la mesure même où tout de moi la désire. Pauvre petite chose.

Or donc, nous y voici encore et infiniment.  Si seulement tu me voyais...  Mes seins sont bandés, la contraction de la fraise est si dense qu'elle en devient presque douloureuse, mes seins pointent à la mort, ce sont des éperons qui te déchireraient la peau si je daignais m'étendre sur toi.  Mais ça, jamais.  Nous y voici, mais ça, jamais. 

Dans la langue que je parle couramment et que les esclaves n'entendent qu'à moitié, rage et désir disent le même, gravitent comme des copeaux enflammés à la limite d'une seule nuit sans fond. Et ça me fait littéralement tourner la tête de voir que tu n'es plus qu'un cul 
en suspens
au-dessus de l'abîme

J'ai le discours saignant des reines qui marchent à la vérité main dans la mort.

Seras-tu à la hauteur?  Je l'espère pour toi.  Parce que moi, je le suis.



J'ai laissé le fer de mes talons rougir pendant deux heures dans le foyer.  Et tu vois où je veux en venir, et tu vois où je vais en venir, car bien que tu ne perçoives que mon ombre projetée sur le mur et le claquement de mes escarpins contre le sol, tu accueilles déjà, à travers la dislocation progressive de ton système nerveux, le sens de ma rage.

Car je marche vers toi et je t'ordonne de relever encore davantage ton cul dégueulasse.  Tu sens la chaleur?  Mais ce n'est rien encore, rien que le grésillement des poils de ton cul qui fument au contact
du
fer
rougi.

Tu cries.

Les muqueuses de ton anus se referment en grillant autour de l'aiguille tournante de ce talon que j'enfonce avec une infinie lenteur et une précision de reine
dans 
ton 
cul
et une fois l'aiguille introduite jusqu'au fondement, je dénoue la liane de mon escarpin, j'en retire le pied, je fais quelques pas en retrait, et je me branle comme une barbare en contemplant le spectacle de l'escarpin coincé dans ton derrière, je reçois de très loin tes cris de goret 
je
mouille
infiniment
je me doigte et me suce les doigts, je m'affole au plus noir, je me poste à quatre pattes sur le tain de la psyché que j'ai couchée sur le sol et je fonce au clitoris
en léchant 
mon 
reflet




À présent, je vais me coucher.  Je te tuerai demain si toutefois je me rappelle encore de ton existence.

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mercredi 27 janvier 2016

Dressages. Carnets de dominance, 1


Tout a commencé par ce selfie que je t'ai envoyé.  Tu m'as vue puis tu as craqué, comme tous les autres avant toi.

J'ai compté tes messages ce jour-là.  41, exactement.  Un indice d'affolement assez élevé, même si j'ai déjà vu pire.  

Tu n'y tenais plus, tu devais me rencontrer.  À te lire, tu allais te tuer si je ne t'invitais pas chez moi le jour même.

Je te tenais déjà par le sang, je contrôlais le jeu de tes représentations, c'était à la fois drôle et terrifiant, mais je devais te faire mariner encore un peu.  C'eut été contraire à l'esprit du jeu que de te faire passer si rapidement dans mon salon.  Et puis, il y avait encore quelque pièces de ton puzzle érotique qu'il me fallait assembler dans le bon ordre afin de préciser l'orientation du dressage et clarifier la ligne de faille qui allait mener à ton anéantissement.

Je peux au moins me vanter de ceci: je n'ai jamais tué un homme avant de l'avoir initié à fond aux règles grammaticales de mon désir. Car je parle couramment cette langue que les esclaves n'entendent qu'à moitié.  

Ça te fait rire.  Mais je connais ce rire, et il ne me convainc pas.  La tête et les poignets coincés dans le chevalet, ton rire se fond au désespoir que tu n'avoueras jamais.  Mais je sens, mais je sais qu'il y a déjà toute une partie de toi
tout au fond
qui
ne
rit
plus.

Et qui tremble de voir la suite.

Mais tu comprends que je ne pouvais pas te faire venir ici et te clouer au chevalet avant que tu m'aies ouvert les dernières trappes de ta psyché.  C'est pourquoi je t'ai fait parvenir 7 images fantasmatiques que je t'ai ordonné de classer par ordre croissant de délire, en commençant par la moins excitante selon tes dispositions, et en finissant par celle qui te faisait éclater la tête.

Trois minutes plus tard, tu me renvoyais les images dans l'ordre suivant.  À un détail près (inversion de la 4e et de la 5e image), je t'avais bien flairé.











Alors j'ai parfaitement compris ce qu'il me restait à faire.  

Deux jours plus tard, tu te mettais à genoux devant moi et je te crachais dans la gueule.  Le pacte était scellé.  Le jeu pouvait commencer.

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jeudi 21 janvier 2016

Le cabinet (feuilleton politique, 7.5)


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Justin craignait le pire.  Il courut au Château Frontenac, certain d’y être accueilli avec une brique et un fanal.  Loin derrière lui, dans la neige levée du jour finissant, Quasithomas et Mélanie le suppliaient de ralentir le pas, mais la nuit les avala bien vite et Justin se retrouva fin seul à gravir les escaliers de pierre, ignorant au passage les citoyens abrutis qui avaient cru le reconnaître et qui erraient sans but dans les rues de la basse ville, orphelins de la voix du grand Jeff qui n’était plus là pour les couvrir de son orage radiophonique et orienter le massacre que réclamait l’étron tournant qui maculait les rebords de leur cuvette cervicale.

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Lorsqu’il pénétra dans la suite 809, il n’y trouva nulle trace de Stéphane, de Pierre-Karl ou de l’ambassadeur de l’Arabie Saoudite.  Les lits étaient faits, les armoires rangées, et les tapis exhalaient encore cette odeur de filtre chauffé qui témoignait du passage récent de l’aspirateur.  Justin était sur le point de redescendre dans le hall lorsqu’il remarqua la présence d’un laptop ouvert sur la table de chevet.  Dans le coin supérieur gauche de l’écran, un post-it avait été scotché sur lequel il était écrit : Regarde, mon chéri…

Il avait à peine effleuré la souris qu’une bande-vidéo se mit en marche.  Il reconnut la suite 809, mais comme issue d’un autre temps et sortie tout droit de la bouche d’un volcan.  Tout d’abord, il aperçut Stéphane, nu fesses, posté devant la fenêtre avec les mains croisées dans le dos.  Quelque chose dans son attitude clochait : on eut dit un enfant puni, mis à la fenêtre comme dans un coin, condamné à compter les voitures qui passaient dans la rue et à qui on eut interdit de se retourner sous peine de recevoir une peine encore plus sévère.
 
À 1:13 de la bande-vidéo, il entendit des rires féminins éclater hors champ.

À 1:15, la masse dénudée de l’ambassadeur roula devant l’objectif de la caméra et vint s’écraser contre le pied de lit.

À 1:18, trois femmes vêtues d’un tchador entourèrent l’ambassadeur chauffé à blanc, puis se dévêtirent avec lenteur, cérémonieusement.  À son tour de fesses et de mamelon, Justin reconnut immédiatement la plus costaude des trois : il s’agissait de Sophie G.  Sa taille était ceinte d’un godemiché; de minuscules lettres gothiques en garnissaient le flanc, et Justin dut plisser les yeux et rewinder plusieurs fois la bande pour finalement distinguer l’inscription Die Geburt der Tragödie.  Sophie G., aligna le gode, le fourra d’une traite dans le cul flapi de l’ambassadeur qui morvait à travers l’écrin de ses dents jaunies, et dont la tête était fermement immobilisée entre les cuisses de la plus frêle des trois femmes.

À 1:22, plutôt que de faire rhaa-rhaa-rhaa, l’ambassadeur fit yap-yap-yap.

À 1:29, Justin dégueula de stupeur sur le tapis.

À 1:43, Sophie D. dit à Julie : «Tu le tiens bien?» et Sophie G. dit à l’ambassadeur qu’elle enculait de face avec grâce et méthode : «Hier soir, j’ai rêvé que ton bouseux de prophète crevait sans sourate, la queue coincée dans la noune d’une truie.»

À 00:00 de l’infini, tout bascula.

Sophie D. s’accroupit, le cul suspendu à quelques centimètres du visage de l’ambassadeur, et lui chia un étron à triple fragmentation dans la gueule.  Julie s’empara aussitôt d’un rouleau de duck tape et momifia à multiples tours la tête de l’ambassadeur dont on n’apercevait plus que les yeux exorbités de terreur et de débilité.  Lorsqu’il commença à étouffer et éructer sous la pression du caca qui refoulait, Julie passa le rouleau de duck tape à Sophie G. qui releva les jambes de l’ambassadeur, ficela ses chevilles sous trois épaisseurs d’adhésif et intensifia d’autant le rythme de pistonnage du royal cul.

À 00:01 de l’impossible, la queue de l’ambassadeur se dressa d’elle-même, en retard de trois royaumes sur la jouissance redoutée, et la marde jaillit des orbites oculaires en charriant dans son torrent les globes capotés, lesquels virèrent sens dessus dessous, à bout de tendon et de torsade, de chaque côté du visage, tout juste au niveau des oreilles, tant et si bien qu’à gauche, l’œil gauche de l’ambassadeur fixait la bol de la salle de bain, alors qu’à droite, son œil droit fixait les fesses de Stéphane qui fixait lui-même la fenêtre sans rien dire.

À 00:02 de la joie par la mort, Sophie D., brandit un cutter de jardinage et se mit à hurler en fixant l’objectif de la caméra :

!! LE FRONT DE LIBÉRATION DES FEMMES DE L’ARABIE SAOUDITE REVENDIQUE LA PROPRIÉTÉ DES CHARS D’ASSAUT QUE LE GOUVERNEMENT CANADIEN DESTINAIT AUX ENFANTS DE CHIENNE DE L’ARABIE EN QUESTION !!  LES SAOUDIENNES CONDUIRONT ELLES-MÊMES LES CHARS QUI TRANSFORMERONT CHAQUE FUCKING PUITS DE PÉTROLE DE LA SUSDITE ARABIE EN FONTAINE DE MARDE !!  LE FRONT DE LIBÉRATION DES FEMMES DE LADITE SUSDITE PROMET D’ACCUEILLIR COMME UNE SŒUR LA SAOUDIENNE QUI LUI LIVRERA LES COUILLES DE FUCKING BEN ABDELAZIZ AL PATENTE !!  LA SAOUDIENNE QUI FERA ÇA, OSTI, SE VERRA OFFRIR UN GYNÉCÉE CINQ ÉTOILES COMPOSÉ DE 77 PUCEAUX AVEC DES ABDOS DE LA MORT ET DES BATTES LONGS COMME MON BRAS PIS C’EST ÇA !!

Le cutter étincela avant de claquer et le sang fila comme une rose soufflée, ses pétales pulvérisés marquant d’une ligne de fouet les cuisses de Stéphane.

 ………………………………………………………………………………………………………………………………………………………….……………c’est le cuuuuuré du village qui s’en va-t-à la chasse il rencooooontre un orignal et lui tire dans le cuuuuuré du village qui s’en va-t-à la chasse, etc. .........................................................................................................................................................

Dos à la scène, les cuisses brûlantes, Stéphane regardait par la fenêtre.  Lui revenaient par bribes les paroles d’une très ancienne chanson qu’il croyait avoir oubliée à tout jamais:

Un regaaaard
Cet après-midi sur le porc
Ce soaaaar, le hasaaaard…



À 00:03 de plus rien du tout, Stéphane pleurait.

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lundi 18 janvier 2016

Le cabinet (feuilleton politique, 7.4)


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Il fallut à Justin pas moins de deux semaines pour rassembler les membres épars de son cabinet et émerger de la brasserie ministérielle du boulevard Saint-Jean.
 
Ce ne fut pas une mince affaire.
 
Après avoir arraché Mélanie au bide graffité de Gaétan B. sur lequel elle n’avait eu de cesse de dégueuler depuis son absorption d’une quantité astronomique de petits baluchons fourrés au fromage de chèvre, Justin dut consacrer un temps fou à décrocher Quasithomas du sapin où il s’était emberlificoté, et à dénouer les multiples tronçons de sa queue dont le gland gouttait dangereusement à proximité de la barre d’alimentation.

Le coup de gong était venu de Stéphane qui avait retraité à l’hôtel Frontenac dès le lendemain de l’orgie au terme de laquelle le maire Bapoume frisa la mort pour s’être retrouvé la tête coincée dans le cul de Christine S.-P., et cela alors qu’on venait tout juste de transporter Martin C. d’urgence à l’hôpital à la suite d’un brutal prélèvement de bite (le fait qu’on eut aperçu des débris de phallus twister entre les orteils de Lucienne R. n’avait pas été jugé significatif, et les policiers de la capitale s’étaient satisfaits de l’explication selon laquelle cette catastrophe de type «objet petit a» ne valait pas une enquête de type «suspect petit gros», et que l’incident n’était en tout état de cause attribuable qu’à une innocente partie de chaise musicale qui avait mal tourné).

Justin avait donc dégrisé d’un seul coup en recevant une avalanche de textos dans lesquels Stéphane lui exposait la situation: 1) il s’était terré à l’hôtel Frontenac en début de matinée; 2) en passant les portes tournantes de l’hôtel, il était tombé sur l’ambassadeur de l’Arabie Saoudite qui avait l’air fort contrarié et faisait un tas de rhaa-rhaa-rhaa inintelligibles en fixant le plafond; 3) Stéphane avait fini par comprendre que l’ambassadeur exigeait de toute urgence une rencontre avec Justin afin de discuter du contrat de 15 milliards de dollars prévu pour la construction de chars blindés; 4) il n’avait réussi à faire patienter l’ambassadeur qu’en l’invitant à monter avec lui; 5) en pénétrant dans la suite 809, il n’avait pas trouvé Sophie G. comme il s’y attendait; 6) il avait plutôt découvert Pierre-Karl P. étroitement ligoté au fond du walk-in, vêtu d’un accoutrement de femme de chambre avec un sabot de Vénus planté dans le derrière; 7) en apercevant Pierre-Karl ficelé de la sorte, l’ambassadeur de l’Arabie Saoudite avait explosé -- de joie, de colère ou de convoitise, cela demeurait à déterminer, mais chose certaine, il s’était mis à bondir sur le lit, enchaînant les rhaa-rhaa-rhaa, et ne s’était finalement apaisé qu’après avoir administré une centaine de coups de fouet à Pierre-Karl -- que l’ambassadeur, semble-t-il, avait alors malencontreusement confondu avec une courtisane de la basse ville, c’était là du moins l’hypothèse que Stéphane hasardait, ne sachant plus à quel saint se vouer, textait-il encore, d’autant que son propre anus demeurait introuvable et que la vision de l’ex-gouverneure du Québec, dont les bearings avaient roulé Dieu sait où, dont les vis et les boulons avaient fini dans la gueule hilare ou affamée de Dieu sait qui, demeurait imprégnée en son esprit comme une dégueulasserie de garniture scotchée sur le carton de la boite d’une pizza commandée deux heures plus tôt et livrée quatre heures plus tard à partir d’un boui-boui répondant à l’appellation schizolinguistique de «Justin Nöther Hole in the Wall / Justin autre Trou dans le Solage».

Passé l’émoi d’origine, Justin demeurait pensif : il se demandait si l’auto-traducteur du portable de Stéphane n’avait pas pu connaître quelques ratés en cours d’exécution.

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- Ne me poussez pas à bout, Pierre-Karl, ne me poussez pas à bout…  Pour la dernière fois, insista Stéphane, dites-moi où est passée la femme de mon chef?
- Rhaa-rhaa-rhaa!
- Aucune idée, répondit Pierre-Karl en recrachant le coussinet de soutien-gorge que Julie lui avait enfoncé dans la bouche avant de quitter la suite en compagnie de ses petites copines.


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jeudi 7 janvier 2016

Le cabinet (feuilleton politique 7.3)


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Pierre-Karl avait passé la soirée entière à peaufiner son image dans le miroir de la salle de bains de la brasserie ministérielle.  Il n’avait pas vu le temps passer et il se demandait si ce n’était pas là un effet du dérapage érotique qu’il avait connu, un peu plus tôt, en compagnie de la femme de chambre du Château Frontenac.

(Rosita avait été très douce : elle avait bien perçu l’excitation de Pierre-Karl au moment où elle changeait les draps.  Lorsqu’il s’était approché d’elle, la queue pointant entre les pans de sa chemise, Pierre-Karl savait qu’il lui suffirait d’un rien pour éjaculer.  Julie était la seule femme capable de le contenir assez longtemps.  Son truc consistait à lui balancer à la figure toute une collection de freins imaginaires -- «ton père est plus intelligent que toi», «tu ne peux pas être à la fois chef de parti et président de compagnie», «Philippe Couillard est un très bel homme», «t’as du fromage autour du gland» --, ce qui ne manquait jamais de le refroidir le temps de déballer sa quéquette et de la fourrer dans les braises tournantes du sexe de Julie.  Mais autrement, l’entrevision, voire la simple suggestion de quelque éclat de nudité féminine pouvait le faire exploser dans son froc; s’il était nu, sa queue fouettait le vide dans tous les sens et le tapioca pouvait voleter dans les rideaux, goutter sur l’écran du portable, météoriser les orteils de sa partenaire, et il entrait alors dans un état de fureur enfantine qui le faisait trépigner, serrer les dents et se donner des coups de poing sur la tête.  Mais Rosita avait été très douce et son intelligence de la situation l’avait conduite à suspendre sur le champ ses opérations domestiques.  Elle s’était contentée de dire «viennes ici, lé bou messiou, viennes ici» puis elle s’était étendue sur le matelas en relevant sa chemise et en simulant une mort aussi tendre que son nom.  Son ventre clair et légèrement duveté sur la ligne du centre, son soutien-gorge couleur crème et son nombril dont la brève obscurité était coupée à l’horizontale par l’élastique de la jupe, tout cela composait une clef de feu qui s’insérait à merveille dans le cerveau de Pierre-Karl : il éjacula en postillonnant sur le ventre de Rosita, puis acheva son effondrement en suçant les aréoles à travers le tissu ébréché du soutien-gorge et en murmurant des insanités nietzschéennes du genre «quel dommage que tu ne travailles pas pour moi, je te congédierais, je te réembaucherais juste pour te congédier à nouveau, ma petite fée péruvienne, entdans, dewors, entdans, dewors, le veux-tu, veux-tu cela encore une fois oui le veux-tu une fucking infinité de fois?…», etc.)

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Dans la salle de bains de la brasserie ministérielle du boulevard Saint-Jean, Pierre-Karl n’avait donc pas vu le temps passer.  Il avait abandonné Julie au bar du Château, puis il s'était mis à errer dans les rues avant d'échouer dans la brasserie libérale où on lui avait tout de suite fait comprendre qu'il n'était pas le bienvenu.  Il avait donc passé la nuit à observer son reflet dans le miroir et à se demander s’il reverrait jamais Rosita – et le cas échéant, s’il pourrait, sans venir trop vite, dérouler sa langue sur les seins goudronnés de cette petite pierre des Andes et résoudre enfin le mystère des aréoles, cette énigme érotique que Pierre-Karl formulait dans sa tête de la manière suivante : commé lolitché le tétounne por qué bandolo y ramollo?
 
À un certain moment, il s’était enfermé dans les toilettes pour pisser et échapper plus étroitement aux rumeurs de l’orgie qui se déchaînait dans la salle d’à côté.  Le mur au-dessus de la bol avait été tagué :

How’s your vagina going today?

I got a dick (rivers) -- not a vagina idiot
(men’s room)
I have chlamydia

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Lorsque Pierre-Karl sortit de la salle de bain aux petites heures du matin, la brasserie ministérielle offrait un spectacle plutôt étrange : tout le monde se trouvait broché par le gland dans le cul de son voisin.  On avait manifestement abusé des capsules de Viagra que le comité organisateur du Parti libéral avait fait circuler entre les tables pendant la fête.  En proie à une érection fantastique dont ils ne pouvaient plus se défaire, les ministres et leurs alliés s’étaient enchaînés les uns aux autres par le derrière, et tout ce que la salle comptait de queues avait fini dans un cul quelconque.  Les convives formaient à présent un immense train dont la circularité était irréprochable, chaque wagon pouvant s’improviser locomotive selon les secousses données ou reçues, la clarté de la loi se nourrissant des dérèglements de la terreur, et l’appel d’offres se relevant à l’infini des cendres de la commission.

Couché sur le dos au milieu du cercle, Gaétan B. semblait comateux : assise à califourchon sur son immense bide, Mélanie, tout en pleurs, laissait couler de lents et longs et sirupeux glaviots dans la bouche grande ouverte de Gaétan.  De temps à autre, elle s’interrompait pour se mettre à hurler :

-  J’A VEUX LE CHÂTEAU FONTENAC, TU VAS ME DONNER LE CHÂTEAU FONTENAC, J’A VA METTRE TOUTES MES POUPÉES DANS TOUTES LES CHAMBES DU CHÂTEAU FONTENAC, BON !

La dernière chose que vit Pierre-Karl avant de sortir de la brasserie, ce fut Martin C. entouré d’une demi-douzaine de femelles libérales qui tiraient sur les dildos qu’on lui avait cloués partout sur le corps.  Lucienne R., complètement paquetée, avait empoigné à deux mains la bite de Martin C., et la tirait à elle de toutes ses forces :

- Ce dildo-là, y'est à moi pis à personne d’autre!  Tabarnak, y m’a coûté ben assez cher de même…


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