lundi 30 novembre 2015
Vaniérismes 12
José Acquelin
ce monde est un précipice de péquenots
sous une injustice d'étoiles
alors soyons creux et universels
aussi égarés qu'un dromadaire
au bout d'une impasse perdue
où viennent se brûler quelques aréoles
grégaires coulantes pustuleuses
et grillons le joint qui nous reste
hors de toutes les demandes de bourses
les récitals ridicules
les compagnons asservissants
soyons inutilement fendants
extrathéosophiques
loin de toute ambition pénitentiaire
ou dépendance ferroviaire
bref
câlissons le krishna dans un taxi
samedi 28 novembre 2015
vendredi 27 novembre 2015
Le cabinet (feuilleton politique, 4)
Harjit consentit à se dénuder, mais à la condition de conserver son turban. Mélanie roucoula de bonheur en apercevant la descente de bedaine du Sikh : elle le satellisait de mille douceurs, lui caressait la barbe, lui pinçait délicatement les fesses et le gland.
À la suite de la charge érotophage de Quasithomas, le cul de Stéphane était en charpie : ses fesses ne reposaient plus tout à fait du même côté de l’équation, et son anus demeurait introuvable, ce qui faisait que Justin était à présent de très mauvaise humeur.
- Quasithomas
- Vmmm?
- Je veux que tu retrouves l’anus de Stéphane. Fouille le Parlement de fond en comble s’il le faut, mais retrouve-le. Et si tu croises ma femme dans les officines, dis-lui que je suis en réunion, que je suis retenu, enfin, invente tout ce que tu veux, mais ne la laisse entrer ici sous aucun prétexte.
Quasithomas chargea son immense queue sur ses épaules et sortit du bureau en boitant. Stéphane râlait et Jean bavait sous lui, toujours incapable de stabiliser sa bouche autour des couilles aggravées par le sang qui bouillonnait de l’outrecul.
- Harjit.
- Vmmm?
- On me dit que tu chies des étrons de la grosseur d’une commission d’enquête, c’est vrai?
- Oooh, ya, ya, tandooli shitload, ya! Good tsikenne!
- À la bonne heure. Alors prépare-toi, je vais requérir tes services dans quelques instants.
Justin saisit Mélanie et la tira de l’étourdissement où elle s’enfonçait depuis qu’elle s’était mise à graviter autour du Sikh. Il était temps de la rappeler à l’ordre de sa simplicité, de suspendre la thèse de son existence frivole et de faire le ménage dans les noèmes érotiques qui voletaient sans ordre dans la pièce depuis que Stéphane était tombé au combat. Il entendait se conformer au mot d’ordre de la phénoménologie husserlienne tel que reformulé par les penseurs anglo-saxons du Carré de Kingston: Au cul même!
Justin déposa Mélanie sur le coin du bureau, coinça ses petites fesses collantes entre deux tomes du Rapport Kapostsky-Tchang sur l’appropriation culturelle des signaux de fumée par les compagnies de tabac, puis il se mit à lui sucer avidement le teton droit (son préféré). Au moment où il introduisit le pouce dans le vagin, il sentit un filet d’urine chaude serpenter entre ses phalanges. Mélanie riait.
- Ooooh, j’a pipi, j’a pipi dans tes mains!
- Mélanie, mon amour, tu sais bien qu’il ne faut pas parler quand je bande…
- Harjiiiiit! Viens aussi! J’a envie de toi tout plein!
Mais Harjit était passé dans un autre monde. Accroupi, les coudes verrouillés sur les genoux, poings serrés, il forçait et se concentrait si dur qu’il n’entendait rien des cris que Mélanie libérait au moment où la fraise de son teton atteignait une densité de cristal dans la bouche de Justin.
(Justin se recueillait. Son gland décalotté surchauffait au fond du vagin de Mélanie. Il se recueillait et se rappelait comment son père l’avait initié à la chose, au printemps 84, alors qu’ils s’étaient retrouvés tous deux dans la chambre d’hôtel de Barbra Streisand. Ce soir-là, l’actrice était plutôt mal en point, elle avait bu, elle hurlait et lançait tout ce qui lui tombait sous la main. L’heure était à la rupture et Justin n’avait encore jamais embrassé une fille. Barbra s’était calmée lorsque Pierre-Elliott avait poussé son fils dans ses bras, mais dès que Justin avait posé ses lèvres sur celles de l’actrice, il s’était braqué, l’haleine de Barbra puait la vomisse, alors il avait entrepris de lui sucer le pif, c’était le seul compromis raisonnable (pour rien au monde il n’aurait voulu que son père eut honte de lui), alors il lui avait léché le nez, il avait englouti le cartilage surdimensionné de l’actrice dans sa bouche, et lorsqu’elle éternua et qu’il sentit la grappe de morve couler dans sa gorge, il éjacula dans ses culottes, se releva sans dire un mot, s’enferma dans la salle de bain et eut la vision de queues lacérées par des ongles longs et rouges et noirs et magnifiques, etc.)
- Harjit.
- Vmmm.
- Ça vient?
- Hmmpf… Tandooli leady!
jeudi 26 novembre 2015
Vaniérismes 11
Hugues Corriveau
J'ai une insécurité dérisoire à l'anus. Les intestins se plaignent encore une heure complète avec l'espoir d'apaiser la solitude des sous-bois. Mais en moi, une diarrhée aberrante, le néant si vif qu'il appelle les os. Un monticule de cendres; et le Journal de Montréal déploie, illusoire, ses défenses anodines. Certains critiques meurent sous le coup de grâce des laxatifs. Sur la colline, des victimes cherchent vainement à imiter le craquement des culs, les boudins fendus, l'ultime connivence des odeurs de l'univers. J'ai mal, et le désodorisant évente des secrets à mon oreille. Là, une culotte déborde.
mercredi 25 novembre 2015
Vaniérismes 10
André du Bouchet
Bûcheron de cochon, me dit encore un ancien codétenu, tu donnes beaucoup de coups de hache sans arriver à couper la tête.
Ceci, qui avait le ton d'une critique, et des moins agréables, touche involontairement à la vérité la plus profonde. L'abattoir lui avait à son insu communiqué une vérité que je croyais incongelable et de moi seul méconnue. De ces remarques, dont je fais mon jambon, je ne lui ai aucune reconnaissance.
Et en effet, si la tête est de cochon, on n'arrivera jamais à la couper, quelle que soit la force des coups de hache! Mais il s'agit seulement d'électrocuter.
mardi 24 novembre 2015
dimanche 22 novembre 2015
Le cabinet (feuilleton politique, 3)
Justin pissa infiniment sur la
queue de Stéphane. Une fois qu’elle fut
bien propre et que le gland s’en trouva miraculé, Quasithomas approcha la
chaise de Jean et l’inclina entre les jambes de Stéphane jusqu’à ce que le
dossier repose à plat sur le sol. Stéphane n’eut qu’à s’agenouiller pour que ses
couilles s’aplatissent contre la bouche déglinguée de Jean.
Justin considérait le module d’un
air pensif : les doigts repliés sous le menton, il prolongeait la pose qu’aurait
adoptée un écrivain médiocre avant le flash du photographe.
- Mélanie.
- Oui, toutou.
- Tu n’aurais pas envie de chier par hasard?
- Moi? Non,
j’a fait caca ce matin. Tu veux que j’appelle
Harjit?
- Harjit?
- Ouiiii, tu sais, le beau vieux Sikh…
- Ah, lui…
L’ostie de fatigant qui me tète pour la Défense… Quel rapport?
- Hmm, on raconte…
on raconte qu’il fait des vraiment gros cacas…
(Cette information plongea Justin
dans une rêverie profonde où il voyait une montagne de culs se déverser dans l’océan
Pacifique. Très jeune, son père lui
avait appris à chier sur la tête des gens.
Il lui avait enseigné qu’un homme digne de ce nom ne pouvait tirer de
plus grand plaisir que de voir un étron se détacher sans bruit d’un cul
supérieur pour choir avec grâce sur la moumoute d’un inférieur. Jean pouvait bien morver dans les couilles de
Stéphane, ça ne suffisait pas, ça manquait de classe et de conviction. Harjit était un brave homme qui ne parlait pas
français, mais si, comme le prétendait Mélanie, ses étrons étaient de taille à
faire affluer la nuit entre les dents, la parité charnelle exigeait qu’il lui
accorde une chance.)
- Mélanie.
- Toutou?
- Appelle le Sikh.
Quasithomas avait commencé à se
déculotter et son immense queue traînait par terre, inégalement bandée. Justin doutait que Stéphane eut jamais été
enculé, il était donc plus que temps de l’initier aux coulisses de la politique
de terrain. Justin déchira sa chemise et
enfourcha la queue de Quasithomas comme un cheval de bois; il sentit aussitôt les
bras puissants de Quasithomas se resserrer autour de sa taille, et sa langue frétiller
sous le lobe de son oreille droite.
- Pedicop,
pedicop… tiyoyo! hurlait Justin.
- Vmmm…
vmmmm… bavait Quasithomas.
Laborieusement, Justin orienta sa
monture phallique en direction du cul de Stéphane. Agitant sa boite postale en plastique, Jean tentait
sans succès d’attraper au vol les couilles ballantes de son partenaire, mais le
signifiant manquait à sa place, la métonymie se généralisait dangereusement et
l’entreprise était encore rendue plus difficile du fait que Mélanie râlait le
nom de Harjit dans son cellulaire tout en frottant son clitoris contre le nez
de Stéphane.
- Stéphane.
- Justin, ne me pousse pas…
- … à bout, oui, je sais, mais le bout ne veut
rien dire. C’est le boutte qui compte,
pas le bout, le boutte. Et toutte au
boutte, tu sais ce qu’il y a? Il y a le
boutte du boutte.
(Stéphane n’en pouvait plus
depuis longtemps. Le prix à payer pour l’obtention
du ministère des Affaires étrangères lui paraissait bien trop élevé. Il pensait aux aiguilles que son épouse lui
enfonçait tendrement dans les tetons, et les larmes lui montaient aux yeux. Il aurait voulu qu’elle soit là, qu’elle le
soustraie au chaos du monde, qu’elle le porte dans ses bras jusque dans son lit, qu’elle déballe ses grosses fesses glacées sur son visage et lui chante
une berceuse jusqu’à ce qu’il s’endorme, et qu’au matin, au réveil, un grand
bol fumant de gruau Quaker l’attende sur le coin du lavabo de la salle de
bain. Ô ma mie, que la prière des
grillons monte de la nuit de banlieue, que ta voix m’atteigne à travers la moustiquaire de la porte patio lorsque je verse la juste quantité de chlore dans la
piscine creusée.)
Justin bondit de la queue de
Quasithomas, l’entoura des deux bras et, d’un solide coup de bélier, l’enfonça
dans le cul de Stéphane qui s’ouvrit comme trois quartiers d’orange sous la
patte d’un rhinocéros.
À cet instant, la tête
enturbannée de Harjit surgit dans l’embrasure de la porte.
-Tandooli tsikenne?
À suivre
samedi 21 novembre 2015
Vaniérismes 9
François Charron
bananes infinies qu'on croyait éteintes pour toujours
la tendresse du ragoût que nous finissons
sans jamais cesser d'éveiller un asticot
rendu visible un clou fatigant pour mieux infecter
la gorge tremble accrochée aux piments
qui la font morver en rêve sans Chef Boyardee
sucer le moignon de cette grand-mère insensée
qui court se régénère et nous poursuit
dodue qui finit par se doigter
pied de céleri selon qu'on arrive on repart
le secret de ces molaires encore mal détachées
la soeur rythmée par la frappe la promesse
d'un pigeon projeté et désossé dans le récit
les motifs varient comme un intestin
jeudi 19 novembre 2015
Vaniérismes 8
Paul Chamberland
Ce frémissement muet
C'est, venu de partout
comme d'un seul trou,
La Gina des motels
Chacun de nous en s'en allant dépose
Un bill de 20
dont nul ne connaît vraiment le poids
ni ce qu'il aura porté d'inassouvi,
d'inexaucé. Un Pharmaprix!
Quelle dame auront vu des yeux cernés,
ceux-là, surtout, à qui l'on arracha le plaster?
Chaude pipe -- et
allez, capotes
vite remballées,
il faut partir: on en spolia combien
du simple répit d'une vente de trottoir?
Il y avait une place dans les toilettes
où tu n'es pas venu. Ce soir-là,
qui sait, peut-être... mais pourrait-on fumer
ce que toujours revend le dealer hindou?
Fumer! Oui, parfois
contre l'exil -- chaude pipe --
revient -- aucun doute -- l'heure
d'une fugace prostituée
que la mémoire retrouve, numéro
composé par tant d'autres
mardi 17 novembre 2015
Le cabinet (feuilleton politique, 2)
Quand Mélanie prit la queue de
Stéphane dans sa bouche, une image d’égout qui refoule surgit dans sa tête,
elle éructa bruyamment et recracha la queue de Stéphane qui fut aussitôt
recouverte d’une nappe de vomi.
Justin considéra la scène avec
effarement. Sur le bureau, son cellulaire
vibrait sans arrêt : c’était le 42e appel que sa femme lui
acheminait depuis le début de la soirée.
- Bon, je suppose qu’il va falloir nettoyer tout
ça... Jean, qu’en penses-tu?
À la vue du vomi qui gouttait de
la queue de Stéphane, Jean avait bien tenté de se relever, de s’immiscer dans
l’orgie naissante de quelque façon, mais le passé le rattrapait, la nuit le
sidérait, et il s’était rassis en mordillant de plus belle sa petite boite
postale en plastique.
- Gnevoulezvousdevoulezvougnezvouslezvous.
- Ne t’emporte pas, Jean. Mon père t’estimait, tu le sais. Je vais ouvrir une fenêtre, oui, c’est ça, je
vais ouvrir une…
On frappa à la porte du
bureau. Mélanie se releva et courut à
l’entrée en s’épongeant la bouche avec un coussinet de son soutien-gorge. C’était Quasithomas. Plus tôt dans la journée, Justin lui avait
demandé de le tenir au fait des derniers développements de la situation à
Paris depuis les attentats.
- Alors?
- Rrrrien.
Une piste mène en Belgiiiique.
Une autrrrre mène en Rrrrussie, une autre mène à un dépaneurrrr de
Rrrroxborrrro.
- Et moi, alors?
Aucune piste ne mène jusqu’à moi?
Quasithomas ne savait que
répondre. L’odeur de la vomisse
l’excitait, il hésitait toutefois à engager son existence contrefaite dans la
pièce. Il se doutait que ses bras de
gorille et sa queue monstrueuse pouvaient être un atout dans les circonstances,
mais Justin était devenu de plus en plus difficile à suivre depuis que Mélanie
s’était coupée en se rasant la chatte dans les toilettes du Parlement.
(Le soir des élections, alors qu’il
était devenu clair que le NPD allait tout simplement disparaître de la carte
politique, Tom Mulcair s’était recroquevillé : il avait ouvert tout grand
les yeux et s’était mis à trembler des babines en couinant comme un porcelet
émasculé. Les premiers sondages lui
accordaient pourtant une victoire écrasante avec plus de 98% des intentions de
vote. Et puis, nul ne savait trop
pourquoi ni comment, le vent avait tourné, l’horreur de la défection létale s’était
matérialisée, et le soir des élections, dans son comté d’Outremont, Tom Mulcair
n’avait récolté qu’une seule voix, en l’occurrence la sienne – il pouvait en
déduire que son épouse elle-même avait voté pour Justin --, et cette crampe
abyssale lui était venue, une secousse charnelle qui s’était achevée dans des
cris de cochons saignés à froid, et jamais depuis Tom Mulcair n’avait retrouvé
le maintien fier et altier qui le caractérisait si bien à l’époque où de
brillantes universitaires avec du poil sur les mollets lui enfonçaient des chichas
fumantes dans le cul. À la fin, Justin
avait eu pitié de lui : il l’avait en quelque sorte pris sous son aile, il
en avait fait son bras gauche et lui confiait de menues tâches telles que commander
la pizza aux anchois, déneiger son entrée de garage et le tenir au fait des micro-oscillations
de l’aiguille sociale-démocrate sur la boussole électorale.)
- Quasithomas.
- Vmmm?
- La situation est pourtant simple : je vais
pisser sur la queue de Stéphane pour la débarrasser des fragments de poulet
rôti qui en pigmentent toujours le gland.
Pendant ce temps, tu vas rapprocher la chaise de Jean et tu vas me
jeter par la fenêtre ce maudit cellulaire qui n’arrête pas de vibrer. Mélanie, ma petite amour, tu es toujours avec
nous?
- J’a vomi, j’a vomi, j’a vomi!
- Je sais, je sais. Allons, reviens-en, j’attends tout de même un
peu plus de self-control de la part de la future ministre des Affaires autochtones…
- Pas les Affaires autochtones. La défense, bon!
- Whatever.
Est-ce que tu as encore ce flacon de parfum que j’avais acheté pour toi
au Jean-Coutu de la rue Jarry, tu te souviens?
C’était quoi le nom déjà? Ce soir ou Jamais? Non… Peut-être mais c’est pas Sûr? En tout cas, si tu l’as toujours, tu le
videras sur la queue de Stéphane après mon pissou, d’accord?
La nuit tombait sur le Parlement
et Stéphane se tenait toujours immobile au centre du bureau avec ses pantalons
déroulés autour des chevilles. Il imaginait
Quasithomas en train de pilonner à pieds joints les débris de la chaise
roulante de l’ex-gouverneure générale du Québec, et il bandait de plus en plus
dur. Il saisit sa queue souillée à deux
mains puis se tourna vers Justin.
- Gne l’ai dit, gne le répète: gne me pousse pas
à bout.
À suivre
dimanche 15 novembre 2015
Vaniérismes 7
Hector de Saint-Denys Garneau
C'est un drôle de plat
C'est un poulet rôti
Il n'est plus là
Il s'agit de le trouver
De le bouffer
Quand il est là
Il s'agit de ne pas le calciner
C'est un poulet rôti
C'est Tweety Bird
Il ne regarde que pour vous baiser
Autrement il ne sait pas quoi faire
Avec ses yeux
Où les crisser
Il les tracasse comme un paysan sa quéquette
Il lui faut aller vers vous
Et quand il se plante
Et s'il arrive
Il n'est plus là
Alors il faut lui tirer dessus
Et le farcir à l'atterrissage
samedi 14 novembre 2015
Vaniérismes 6
Anne Hébert
Ô ! Spacieux vibrateur
Fontaine intacte
Devant moi déroulée
À l'heure
Où quittant du dentier
La pénétrante nuit
Dense forêt
Des rêves cochons
Je reprends mes yeux pochés et coulants
Mes amants latinos et sans surprises
Premiers reflets dans le gin du matin
vendredi 13 novembre 2015
jeudi 12 novembre 2015
Vaniérismes 3, 4 et 5
Pierre Ouellet
La queue: une tu-
mescence gorgée d'amour dont on ne
veut pas. Qui reste là
coincée en soi. Puis sort en tabarnak
au bout d'un temps. Les balles chauffent
dans le godemiché. C'est de la coke
qui bout. La mort
y cuit. Mijote. Un jour
ça vous enflamme: la queue et l'âme sous la
poche gauche. On n'en
peut plus: ça brûle les tetons et la
cervelle. On est
comme fou: on sort sa queue on tire
partout. Ça fait plum pudding: il y a plein de gens
qui picolent autour qui ne s'en relève-
ront pas.
*
Pierre-Jean Jouve
Là-haut sur le toit même souffle un air de boeuf
Frisant continuellement le Gyproc et les forêts
Un pet si rare au milieu des formes tragiques
Harmonieuses par l'intense ciel fucké;
Le pet fend
Les poumons et le coeur et la chair ou douleur
L'aspirine l'espérance et le torticolis,
Le pet revêtu de foin et d'absente chaleur,
Effaçant jusqu'aux haines d'un amour de plombier
Des forêts comme l'orgue aux prologues du nécrophile
Il engendre un grand tibia
Tutoyant le Kraft Dinner en notre éternité
*
Paul Celan
Lait noir du petit jour nous le dégueulons le soir
nous le dégueulons midi et matin nous le dégueulons la nuit
nous dégueulons et dégueulons
nous creusons une tombe dans les airs on y sue à son aise
Un homme qui habite la bécosse qui joue avec les couleuvres qui écrit
qui écrit quand il fait sombre sur Drummondville tes cheveux d'or
Rolande
il écrit cela et va à sa porte et les étoiles capotent il siffle pour appeler
ses chiens
il siffle pour rappeler ses vaches et fait creuser une tombe dans le
solage
il nous ordonne accouchez maintenant qu'on y baptise
lundi 9 novembre 2015
Le cabinet (feuilleton politique, 1)
Ils étaient là, tous les quatre,
dans le bureau de Justin. Stéphane
demeurait debout et se taisait: il avait abaissé son pantalon, mais il n’était
pas allé plus loin. En toute conscience,
il ne pouvait pas aller plus loin. Il avait
donc conservé son slip, sa chemise, sa cravate et ses bas bleus. Son pantalon formait un petit tas ridicule
autour de ses chevilles. Il rougissait
de ses propres cuisses dénudées, épilées comme celles d’un athlète.
Justin retira son veston et le
tendit à Jean qui était déguisé en crise d’octobre 70, avec un casque de
militaire qui versait sur le côté gauche et une petite boite postale en
plastique tout écrapoue qu’il triturait sans cesse entre ses doigts crochus. Justin se tourna vers Stéphane.
- Si tu veux le ministère des Affaires étrangères,
faut tu baisses les culottes.
- Ne me pousse pas à bout, Justin, ne me pousse
pas à bout…
Jean agitait mollement sa boite postale pendant que Mélanie réajustait la bavette souillée qui lui pendouillait au cou. À travers la fenêtre du bureau, on voyait voleter les cendres qui se détachaient des arbres enflammés de la colline parlementaire.
(Justin n’avait pas rappelé sa
femme pour la prévenir de son retard. Il n’avait pas cessé de penser aux boules de Mélanie. Plus tôt cet après-midi, Mélanie s’était
penchée pour rajuster ses bas nylons ou rattacher la courroie de ses talons
aiguilles, il ne savait plus trop, mais elle s’était penchée – ça, il s’en
souvenait --, et il avait vu ses boules sous la chute du chemisier, et à partir
de ce moment-là, il n’avait plus cessé de penser aux boules de Mélanie, deux petites
bêtes couleur caramel ficelées solide entre deux cornets de satin rouges, il
n’en avait que pour les boules de Mélanie qu’il voulait mettre à nu une fois
pour toutes, déballer assez rudement, juste avant de lui confier le ministère
du Patrimoine ou celui de la Chasse et de la Pêche, il ne savait plus trop,
mais elle s’était penchée, etc.)
Et à présent qu’elle était tout
près de lui, complètement nue et le cul laqué par des coulures de sperme ancien,
il lui venait des élans d’une cruauté infinie.
- Mélanie.
- Oui, toutou.
- Deux plus trois, ça fait combien?
Et Mélanie s’était remise à
pleurer, mais ça ne durerait pas. Il lui
suffirait de glisser un doigt dans la fente de son cul pour qu’elle oublie tout
et se remette à rire aux éclats. Justin
a toujours aimé les filles simples, et Mélanie était une fille qu’on ne pouvait
simplifier davantage. Il en avait eu la
confirmation lors d’un souper bénéfice, alors qu’il l’avait bêtement comparée à
un lutin de Noël, et qu’elle s’était esclaffée en postillonnant dans son potage
aux betteraves.
Une si grande ambition politique
contenue dans un si petit pioupiou, c’était quelque chose qu’il entendait
respecter, vénérer même, dût-il lui râper les fesses avec du papier sablé.
- Mélanie.
- Tu m’as fait de la peine, t’es un méchant toutou,
je te parle plus.
- Mélanie, mon amour, tu veux le ministère du
Tourisme?
- Pas le tourisme.
Je veux le ministère de la Défense, bon.
- Whatever.
Alors écoute, pour ça, je voudrais que tu suces Stéphane.
- Ark. Son
pinisse pue.
- Mais…
Mais comment peux-tu dire ça? Il a
même pas encore enlevé ses bobettes!
- Son pinisse pue les vidanges, je le sens d’ici,
bon.
Stéphane rougissait de plus en
plus. Et dès qu’il tentait de fixer son
esprit, de se concentrer sur autre chose, il voyait l’ex-gouverneure générale
du Québec débouler les escaliers du Parlement en chaise roulante, ce qui avait
pour effet de le faire bander.
- Mélanie, petite amour, c’est à prendre ou à
laisser : tu le suces ou rien du tout.
Mélanie tira la langue à
l’intention de Justin, puis elle s’agenouilla de mauvaise grâce en face de
Stéphane qui fixait les sapins embrasés à travers la fenêtre. Sous le coup de la honte, il sentait ses
aisselles se liquéfier.
- Je te préviens, Justin, ne me pousse pas à bout…
À suivre
mercredi 4 novembre 2015
Vaniérismes 2 (Nicole Brossard)
Vaniérisme: pulsion esthétique qui consiste à catastropher des poèmes mignons et un peu poches pour en faire quelque chose qui a de la gueule et des couilles
magie des oignons lubrifiés
menu fragment de Tampax
qui sommes-nous
pour sucer encore
au fil des métaphores de morpion
la soie brève des contrastes d'aube et de gros orteil
lundi 2 novembre 2015
Poème déviargé d'Hélène Dorion
D’ici bouge le poulet
rôti. Masturbe
le vide lourd sur
l’épaule
éparpillé parmi les fromages.
Cherche ce que tu
appelles, l’impossible
mosaïque décrissée du
voyage
et la vulve qu’on
dirait brûlée
par le temps. Masturbe
seulement le vomi
où résonne ta vie. La
marde jamais vue
visible maintenant,
dans les yeux du soir.
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